10 Décembre 2008
Il est une polémique entre certains entomologistes et les apiculteurs. Les premiers prétendent que l'abeille est un butineur qui empêche la biodiversité de s'exprimer en accaparant une grande
part des ressources disponibles en nectar et pollen au détriment des autres insectes, en particulier d'insectes protégés.
Amateurs des deux (insectes en général et abeilles en particulier) nous souhaiterions rétablir ce qui nous semble la réalité sur le terrain. Par des observations régulières, nous sommes amenés à
prouver quotidiennement la large cohabitation des abeilles avec de nombreux insectes :
Cette cohabitation est possible grâce à de grandes différences entre les espèces quant à l'exploration des ressources, en voici quelques exemples :
- dans le temps : Pour avoir passé près d'un mois à observer des fleurs de pommiers du matin au soir pour étudier leur pollinisation, je peux vous certifier qu'à l'intérieur
d'une même journée, les mouches, papillons et bourdons sont beaucoup plus abondants que les abeilles sur la plupart des fleurs le matin et le soir. En journée, les abeilles
reprennent leurs droits, car c'est une ressource très riche pour elles.
- dans le mode d'exploration des ressources : les abeilles ne visitent que des fleurs intéressantes quant à la quantité et la qualité de nectar, ce qui laisse beaucoup de place pour de petits
hyménoptères ou d'autres ordres qui se satisfont largement de petites quantités de nectar à la fois. Par ailleur, chaque abeille qui passe sur une fleur laisse une phéromone, un genre de marque
olfactive, qui dit à l'abeille suivante : quelqu'un est déjà passé ici. Cela laisse à d'autres insectes, qui ne reconnaissent pas cette odeur, la possibilité de passer ensuite, alors que les
nectaires ont déjà commencé à sécréter quelques nouvelles gouttes du précieux nectar.
- dans l'accès à certaines fleurs : la morphologie de certaines fleurs ne permet pas aux abeilles d'y accéder, lorsque les nectaires sont hors de portée de leur langue, somme toutes assez courte.
Les papillons, avec leur trompe très longue peuvent alors s'abreuver facilement, de même que les petits insectes qui se faufilent dans la corolle, ou encore les bourdons qui en perforent la base
pour s'approvisionner. Les abeilles peuvent tout de même profiter de ces perforations pour butiner un nectar peu accessible, comme le prouve l'abeillle ci dessous qui passe après un
bourdon sur une glycine.
- dans le mode d'exploitation des ressources : les abeilles utilisent le pollen en fonction de leurs besoins, alors qu'elles donnent priorité au nectar pratiquement tout le temps.
Extrêmement efficaces, elles organisent leur butinage de façon à n'utiliser que les ressources les plus rentables, ce qui laisse en général large place à de nombreux insectes sur
les multiples espèces qu'elles ne visitent pas. Pour avoir semé il y a environ 10 ans plus de 70 espèces végétales nectarifères et pollinifères dans mon jardin (avant le numérique,
sinon je vous aurais envahi de photos), je peux vous certifier que les abeilles n'en visitent qu'un nombre très limité, qui peut varier d'une heure à l'autre dans la journée.
... Sans oublier que l'abeille peut aussi être un aliment pour d'autres insectes prédateurs ou charognards :
J'invite les naturalistes qui nous visitent à faire des observations à ce sujet et de nous les rapporter par leurs commentaires.